Priorité donnée à la location saisonnière et coup de frein sur la construction. Résultat : Saint-Martin fait désormais face à un gros déficit de biens à louer.
Les non-propriétaires devront-ils bientôt dormir à la belle étoile ? C’est l’inquiétude de cet homme qui recherche désespérément une villa à louer depuis le mois de septembre puisque le bail de son logement actuel se termine en janvier prochain. Offrant pourtant d’excellentes garanties compte tenu de sa situation professionnelle, celui qui aspire à loger dans une villa avec deux chambres et un jardin affirme : « il n’y a rien ». Ce type de bien, pourtant classique, est en effet devenu très rare sur le marché de la location.
A Saint-Martin, il existe certes une forte saisonnalité de la location longue durée : avec le jeu des mutations et le calendrier scolaire, il est souvent plus facile de trouver un bien entre mai et août. Mais les agences immobilières confirment effectivement que la situation, déjà tendue, s’est corsée depuis la fin de l’été. Pour François Huc, agent commercial chez Immo Dom, il y a « pénurie complète et totale de logements, notamment de logements corrects c’est-à-dire propres, décents, et de taille normale ». L’homme confirme d’ailleurs que la situation s’est récemment aggravée : « depuis la rentrée de septembre 2015, il y a de grosses difficultés à se loger, car on compte de moins en moins de biens neufs, et ce marché n’est actuellement pas extensible ». Un constat partagé par l’agence Sprimbarth – Cap Caraïbes. Selon son PDG Jean-Paul Clerc « depuis six mois la courbe s’est progressivement inversée, et désormais il y a plus de demandes que de biens sur le marché ». Un marché qui s’est donc très appauvri : « pour la première fois nous n’arrivons pas à satisfaire la demande ». Dans une agence immobilière de la place, seulement une vingtaine de logements en location sont entrés cette année. « C’est peu », confirme l’un de ses responsables.
PRIORITÉ À LA LOCATION SAISONNIÈRE
Les propriétaires auraient de plus en plus tendance à passer leur bien en location saisonnière. Si pour certains cela rapporte plus, pour d’autres, c’est l’assurance d’éviter un locataire mauvais payeur dont il est toujours difficile de se séparer. En outre « les propriétaires ont envie d’utiliser leur bien quand ils le souhaitent » confirme le PDG de Sprimbarth – Cap Caraïbes qui a bien relevé ce glissement. Chez l’un de ses confrères le bilan est identique : « beaucoup de biens partent en location saisonnière, ça appauvrit le marché. Trouver un logement de trois chambres est de plus en plus difficile ». Chez Cagepa ont tire aussi la sonnette d’alarme : « il y a beaucoup plus de petits biens disponibles » rapporte le directeur Nicolas Nakache.
PEU DE PROGRAMMES NEUFS
Aujourd’hui le territoire se caractérise par le faible nombre de programmes neufs eu égard à la pression démographique. Chez Immo Dom, François Huc évoque cette carence de la construction : « il n’y a pas de logements neufs alors que la population augmente ». Les dispositifs de défiscalisation instaurés par le gouvernement pour lutter contre la pénurie de logements à louer dans les territoires d’Outre-mer sont en effet aujourd’hui moins incitatifs que par le passé. Les niches fiscales offertes par la loi Girardin s’éteignent progressivement puisqu’elles sont applicables pour l’acquisition de tout logement neuf dont le permis de construire a été délivré avant 2013. Un permis de construire étant valide trois ans, les particuliers doivent faire l’acquisition du bien convoité… avant la fin de l’année 2015. Reste aux contribuables le dispositif de réduction d’impôt « Pinel Outre-mer » (ex loi Duflot), applicable aux investissement locatifs réalisés à Saint-Martin depuis le 1er septembre 2014.
Selon Nicolas Nakache de Cagepa, qui a rentré une cinquantaine de logements en location sur toute l’année, «il y a moins de biens qui entrent en location car les régimes de défiscalisation sont plus pauvres que par le passé ». En outre, « les biens de grande surface sont difficiles à trouver car les lois de défiscalisation précédentes ont favorisé les logements de petite surface ».
Saint-Martin fait donc face à une carence de constructions nouvelles qui va peser de plus en plus fort sur le marché de la location. « On exécute en ce moment les programmes d’il y a 3 ou 4 ans » rapporte l’association des représentants du BTP, rappelant que « le frein à main a été tiré il y a déjà cinq ans ».
Outre la crise économique qui a ralenti les ardeurs des investisseurs et une fiscalité nationale plus molle, Saint-Martin a un gros pari à faire sur l’avenir pour éviter une inexorable flambée des prix et le développement – déjà trop important – du parc de logements insalubres : libérer le foncier. Si elle a pris cette année des mesures fiscales incitatives pour agir sur l’offre de terrains constructibles (exonération totale sur la plus-value et droits d’enregistrement réduits), elle ne pourra se passer d’un Plan local d’urbanisme ambitieux en phase avec les exigences démographiques du territoire.
LE CHIFFRE
1600 à 1800
c’est le nombre de logements supplémentaires tous types de biens confondus dont aurait besoin notre territoire, selon l’association des représentants du BTP
Investir à Saint-Martin :
des niches fiscales pour les résidents
Compétente en matière de fiscalité, la Collectivité a créé des avantages fiscaux en faveur des résidents qui réalisent des investissements, et notamment dans le secteur du logement, jusqu’au 31 décembre 2020. Pour en bénéficier, il faut être fiscalement domicilié à Saint-Martin. La réduction d’impôts s’applique lors de la construction ou l’acquisition d’immeubles neufs situés à Saint-Martin, lorsque le contribuable s’engage à affecter le logement à sa résidence principale pendant 5 ans, ou à le donner en location non meublée dans les six mois de l’achèvement ou de l’acquisition à des personnes qui en font leur résidence principale. La réduction d’impôt peut aussi s’appliquer lors de la souscription de parts ou actions de sociétés dont l’objet réel est de construire des logements neufs, ou pour des travaux de réhabilitation de logements achevés depuis plus de 40 ans.
La base de la réduction d’impôt pour les investissements réalisés dans le secteur du logement est plafonnée à 2300 € HT par m2 de surface habitable.
La réduction d’impôt est étalée sur 5 ans à partir de l’achèvement de l’immeuble (ou de son acquisition si elle est postérieure), de l’année de l’achèvement des travaux de réhabilitation ou de l’année de souscription des parts ou actions au capital de sociétés. Chaque année, la base de la réduction d’impôt est égale à 20% des sommes payées.
A noter que pour l’acquisition ou la construction d’un logement neuf que le propriétaire prend l’engagement d’affecter à son habitation principale pendant 5 ans, la réduction d’impôt est étalée sur 10 ans à partir de l’année d’achèvement de l’immeuble ou de son acquisition.
La réduction d’impôt s’élève à un taux de 25% ou 30% de la base retenue selon les cas.
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